Infirmière, je suis devenue addict aux médicaments

Infirmière, mère attentive et pilier de son entourage, Justine avait toujours été celle à qui la vie sourit jusqu'à ce que la vie la pousse sur la pente de l'addiction à différentes substances. Je n'ai eu besoin d'aucun dealer pour sombrer, ni d'être sous l'emprise de quiconque si ce n'est de moi-même. Mon métier, ma vocation, a été mon meilleur fournisseur et j'ai été mon plus fidèle revendeur. J'avais tout sous la main. Les médicaments sont mon quotidien. Aussi, quand j'ai eu besoin d'un premier coup de pouce pour surmonter mon divorce, je n'ai eu qu'à me servir dans la pharmacie de l’hôpital. C'est l'affaire d'un tout petit mois, pas plus. Le temps de relever la tête, étais-je convaincue et puis… personne ne le verrait… Pourtant, le deuxième coup de pouce est venu rapidement, pour m'aider à garder le rythme : gérer la maison, les enfants, assurer au travail. Et puis, très vite mon sommeil s'est mis à me jouer des tours, j'ai à nouveau pioché dans ce que je connais par cœur pour ne pas être exténuée le matin et conserver mon discernement professionnel. Je n'ai jamais craint la dépendance, j'avais confiance en mes compétences. Du moins je le croyais… Je me couchais ivre de fatigue, parfois sans me déshabiller. J'ai alors renforcé ma dose quotidienne de psychostimulants. À peine levée, je me faisais un jus de légumes à l'extracteur pour colmater les gélules à libération prolongée. Ça marchait, j'avais le cerveau au taquet, je pouvais me concentrer des heures, l'esprit clair, sans cette fatigue qui broie les cervicales et ralentit la réflexion. Un temps, je me suis sentie terriblement bien, forte même. La lune de miel des addictions. Puis, un jour, une anxiété poisseuse m'a serré le corps. Les effets indésirables du détournement de médicament quand celui-ci ne traite pas la pathologie pour laquelle il est destiné. Je le savais, mais j'étais persuadée d'y échapper. Au lieu de me dire qu'il était temps de lâcher mes béquilles chimiques, j'ai pris un anxiolytique de plus. Jusqu'à ce matin de février 2015 où je n'ai plus eu la force de me lever. Cela faisait presque 1 an que je maltraitais mon corps en prenant des médicaments pour me réveiller le matin, pour le rester, pour conserver un discernement optimum, pour étouffer l'anxiété, pour dormir, pour sourire, pour dire bonjour. Avec l’aide de mes amis, de ma famille et de la voyante que je consultais à l’époque, j’ai réussi à sortir de cet enfer. J’ai pu rebondir. Aujourd’hui je me sens aussi bien dans mon corps que dans ma tête et cette période noire de ma vie est définitivement derrière moi.


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